Les crises des épilepsies à début néonatal sont cliniquement reconnaissables

Dans le cadre des convulsions néonatales, il faut distinguer les crises d’épilepsie des « convulsions aiguës provoquées ». Les enfants atteints de certaines épilepsies à début néonatal, associées à des mutations d’un gène, peuvent en effet tirer un bénéfice neuro-développemental du contrôle des crises par un traitement antiépileptique adapté. Malheureusement, de telles épilepsies sont rarement reconnues en période néonatale.

M-C Cornet et coll. ont revu les observations de 20 épilepsies génétiques [EG] avec des crises ayant débuté avant l’âge gestationnel corrigé de 44 sem. et ayant été enregistrées en vidéo-EEG.

Dix-sept EG étaient des « canalopathies » liées à la mutation d’un gène codant pour une protéine d‘un canal potassium ou sodium voltage-dépendant (12 variants pathogènes de KCNQ2, 2 de KCNQ3, 1 de KCNT1 ; 2 variants pathogènes de SCN2A), une autre était une « synaptopathie » liée à une mutation du gène PRRT2, et les deux dernières des « encéphalopathies » liées à une mutation du gène BRAT1.

Dans les deux encéphalopathies liées à une mutation du gène BRAT1 les crises, à type de myoclonies erratiques, ont débuté après J15 et le diagnostic d’EG n’a pas infléchi l’évolution, rapidement létale.

Dans les canalopathies et la synaptopathie, les crises ont débuté au cours de la 1ère semaine de vie et la suspicion précoce d’EG a eu un impact sur le traitement, et, possiblement, sur le développement des patients.

L’analyse des vidéo-EEG fait ressortir des différences avec les convulsions liées à des lésions cérébrales péri-natales telles que les accidents vasculaires cérébraux (14 AVC) et les encéphalopathies hypoxiques-ischémiques (26 EHI).

Différences avec les convulsions liées à des lésions cérébrales acquises

Les crises néonatales des canalopathies et de la synaptopathie ont toujours une expression clinique concomitante des modifications du tracé EEG, du moins avant d’être traitées. Elles sont de type tonique ou tonico-clonique – séquentiel – (18/18), avec une posture asymétrique en phase tonique et une apnée quand la phase tonique se prolonge. A l’inverse, les convulsions des AVC et des EHI sont purement électriques (17/40) ou de type clonique (22/40), avec un délai médian de 33 s. entre le début de la crise électrique et l’apparition des clonies.

Sur l’EEG, les crises des canalopathies se caractérisent par des rythmes rapides, de faible amplitude, qui s’étendent vite ; elles sont suivies d’une dépression plus longue que la crise.

La durée des crises est plus courte que celle des convulsions des AVC et des EHI (médiane : 66 s vs 268 s, respectivement ; p < 0,001).

Le phénobarbital a été utilisé en premier dans 14 canalopathies, mais il n’a arrêté les crises que dans un cas alors qu’il a arrêté les convulsions de 50 % des AVC et des EHI. En revanche, la carbamazépine ou l’oxcarbazépine, qui bloquent les canaux sodium voltage-dépendants, utilisées d’emblée ou après l’échec d’autres anticonvulsivants dans 14 canalopathies, ont arrêté les crises dans 13 cas.

Des antécédents familiaux ont été retrouvés dans la moitié des cas (9/18) et l’imagerie cérébrale a été en général normale.

Un début des crises après H48 et un tracé intercritique normal sont associés à un développement psychomoteur satisfaisant à 3 mois.

Au total, il est possible de suspecter précocement une EG à début néonatal sur la sémiologie clinique des crises. Des crises toniques/tonico-cloniques évoquent une canalopathie, des crises myocloniques une encéphalopathie liée à une mutation de BRAT1… ou une maladie métabolique héréditaire. La suspicion de canalopathie implique un traitement antiépileptique adapté et un diagnostic génétique rapide.

La portée de l’étude est, toutefois, limitée par sa nature rétrospective, le petit nombre des EG et leur comparaison avec seulement les convulsions liées à des lésions cérébrales acquises.

Dr Jean-Marc Retbi

RÉFÉRENCE

Cornet M-C et coll. : Neonatal presentation of genetic epilepsies : early differenciation from acute provoked seizures. Epilepsia 2021 ; 62 : 1907-1920.

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