Diarrhée sanglante chez l’enfant, peut-on anticiper un SHU ?

Publié le 13/10/2021

Une grande variété de pathogènes peut provoquer une diarrhée sanglante chez les enfants, d’incidence variable selon les pays et la saison. Dans les pays occidentaux, les principaux sont les Campylobacter, Salmonelles, Shigelles, Yersinia et Escherichia coli, producteurs de Shigatoxines (STEC) notamment. Ces derniers peuvent être la cause de syndrome hémolytique et urémique (SHU), responsable de micro-angiopathie thrombotique, une cause majeure d’atteinte rénale en dehors de la période néonatale. Les caractéristiques en sont une consommation de plaquettes, une hémolyse mécanique, une atteinte rénale et multi-viscérale. Identifier les souches responsables est d’une importance majeure pour la surveillance des enfants infectés.
Des pédiatres italiens rapportent les résultats d’une vaste étude sur le dépistage dans les selles de la toxine ST d’E coli, pendant 10 ans, dans 63 centres de pédiatrie du Nord du pays, couvrant une population de 2,3 millions d’enfants. Les prélèvements fécaux étaient analysés dans un centre à Milan dans les selles sanglantes prélevées aux urgences ou à l’admission.

Les buts étaient d’évaluer la prévalence des STEC parmi les enfants souffrant de diarrhée aiguë sanglante, de la distribution des gènes de Stx (toxine de Shiga) dans les selles et des sérotypes de colibacilles. Les paramètres biologiques à la présentation et lors de l’évolution des cas dépistés et/ou diagnostiqués à l’occasion d’un SHU ont été comparés.Les patients STEC + étaient réhydratés et surveillés pour détecter une hémoglobinurie jusqu’à la résolution de la diarrhée ou l’évolution vers un SHU.

Rechercher la Shigatoxine 2 dans les selles

Au total, 4 767 enfants ont été testés : 214 (4,5 %) étaient positifs pour les gènes Stx1 (62, 29 %) ou Stx2 (97, 45,3 %) ou les deux (55, 15,9 %). Le risque de SHU n’existait que pour les porteurs du gène Stx2 seul ou en association avec le Stx1. Ainsi, le risque de développer un SHU était de 23,7 % pour les porteurs de Stx2 seul, de 12,7 % pour Stx1+2 et de 0 % pour Stx1 seul (p < 0,0001). Globalement, le risque au cours des diarrhées sanglantes de portage du gène Stx2 était de 3,2 % (152/4767) et de développer un SHU de 0,71 % (34/4767). Le typage des colibacilles n’apportait pas de renseignements supplémentaires car les porteurs de Stx étaient infectés par des types variés : O157 25 %, O26 25 %, O103 7 % et bien d’autres.
D’autre part, pendant la période considérée, 95 autres patients ont souffert d’un SHU mais n’ont pas participé au programme de screening (26 sans diarrhée sanglante, 11 résidant dans une autre région, 58 dont le prélèvement n’a pas été adressé). A la présentation du SHU, le taux de créatinine était significativement plus bas chez les patients dépistés que chez les non dépistés (79 mmol/L vs 132 mmol/L). A court terme, le taux des complications neurologiques et des épurations extra-rénales était comparable. En revanche, l’évolution était plus favorable à long terme chez les enfants diagnostiqués avec une infection à Coli STEC avant un SHU : évolution sévère 2,9 % vs 15,8 %.
En conclusion, environ 1 % des enfants avec une diarrhée sanglante développe un syndrome hémolytique et urémique qui peut être anticipé par la recherche de toxine Stx2 dans les selles.

Pr Jean-Jacques Baudon

RÉFÉRENCE

Ardissino G et coll. : Bloody diarrhea and Shiga toxin-producing Escherichia coli hemolytic uremic syndrome in children: data from the ItalKid-HUS Network. J Pediatr., 2021; 237: 34-40.

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