Le Lait maternel

Alain DABADIE

Rappel physiologique

La maturation mammaire (développement des canaux galactophores) se produit au cours de la grossesse sous l’action conjointe des œstrogènes et de la progestérone qui développe les acinis. Ces hormones sont d’origine ovarienne et surtout placentaire chez la femme enceinte.

La sécrétion lactée est elle-même sous la dépendance de la prolactine, secrétée par l’hypophyse antérieure dès le deuxième trimestre de la grossesse (une très légère sécrétion lactée est possible au 5ème mois de grossesse), mais dont l’action est inhibée par les hormones placentaires. L’accouchement et la disparition du placenta lèvent cette inhibition permettant à la prolactine d’agir rapidement sur la glande déjà préparée : c’est la montée laiteuse.

La sécrétion lactée est favorisée par l’augmentation des glucocorticoïdes libres type Cortisol, liée en partie à la sécrétion accrue d’ACTH qui accompagne l’accouchement. Par contre, la sécrétion des gonadotrophines hypophysaires est bloquée par l’action de la prolactine, ce qui explique l’aménorrhée physiologique, transitoire de la lactation.

L’éjaculation du lait et l’entretien de la sécrétion dépendent d’un mécanisme neuro-hormonal induit par la succion du mamelon. Ces excitations mécaniques déclenchent, par l’intermédiaire du diencéphale, une sécrétion de prolactine et d’ocytocine. L’ocytine produite dans le lobe postérieur de l’hypophyse entraîne la contraction des cellules myoépithéliales qui entourent les acinis et l’éjaculation du lait.

Enfin, le diencéphale et par lui le cortex cérébral joue un rôle dans la sécrétion lactée, expliquant en particulier l’influence des émotions sur la sécrétion.

On retiendra de ce rappel physiologique que :

La sécrétion lactée se prépare pendant la grossesse ; c’est donc à ce moment qu’il convient de conseiller ce mode d’allaitement à la future mère et de noter l’état des seins et des mamelons

La mère doit avoir le désir de nourrir son enfant et un climat favorable doit être maintenu en évitant, anxiété, émotions, soucis, douleurs (action diencéphalique) − la succion joue un rôle important dans le déclenchement et le maintien de la sécrétion lactée.

LE COLOSTRUM constitue la première sécrétion: Il s’agit d’un liquide jaune, de densité élevée (1040 -1060), riche en protéines (23g/L) et contenant une quantité importante d’acides aminés libres (20%). Il est, de plus, riche en sels minéraux (magnésium, calcium) et en immunoglobulines, surtout IgA. Il contient des macrophages, contribuant à la défense contre l’infection. Il favorise l’évacuation du méconium. La sécrétion est facilitée par la mise au sein de l’enfant qui, s’il n’a reçu aucune alimentation, a soif et tète avec énergie. La quantité au début faible (20 à 40 ml seulement) va augmenter rapidement.

LE LAIT DE TRANSITION succède au colostrum pendant une période intermédiaire de quelques jours qui aboutit au lait mature en 2 à 3 semaines.

Ce chapitre s’attache à décrire les qualités nutritionnelles du lait maternel par la description de la COMPOSITION DU LAIT MATURE

I. UNE ANALYSE COMPARATIVE,

Même grossière, la comparaison des laits des différents mammifères met en évidence les différences de composition liées aux différences de besoins de croissance et souligne la parfaite adaptation du lait à l’espèce.

De façon schématique, la teneur en protéines est d’autant plus élevée que la croissance est rapide; la teneur en lactose est d’autant plus élevée que la croissance cérébrale post-natale est importante; la teneur en graisses est d’autant plus élevée que les besoins énergétiques (notamment de thermorégulation) sont importants.

Pour souligner ses qualités, d’autant que les “habitudes alimentaires“ l’ont au cours des décennies passées mis en concurrence avec le lait de vache, il est habituel de comparer point par point le lait de femme à la composition du lait de vache. Ceci permet d’expliquer les avantages de l’allaitement maternel et de comprendre les modifications apportées pour la conception des aliments lactés infantiles, même si l’objectif de la reconstitution industrielle du lait de femme tient de la gageure.

LAIT DE Femme Vache
PROTIDES TOTAUX (en grammes) 0,8 à 1,2 3 à 3,5
a) Protéines 1,2 3,5
– Caséine 40% 80%
– Lactosérum (protéines solubles) 60% 20%
Lactalbumine 35% 7%
Bêta – Lactoglobuline 0 8%
Lactotransferrine 15% 0,2%
Immunoglobuline 10% 2%
b) Azote non protéique 0,05 0,03
  
GLUCIDES (en grammes) 7 5
a) lactose 6 5
b) oligosaccharides 1 traces
  
LIPIDES (en grammes) 3 à 4 3 à 4
AG saturés / AG non saturés 50% / 50% 75 % / 25 %
  
Total MINÉRAUX 200 700
Sodium (en milligrammes) 10 – 20 50 – 60
Chlore 45 110
Phosphore 14-15 90
Calcium 27-32 120
Rapport C/P 2 1,3
Magnésium 3,5 12
  
Fer (en microgrammes) 30 à 70 10
Zinc 50 à 400 200 à 500
Cuivre 25 à 70 2 à 15
Iode 3 à 50 
  
Vitamines  
A (UI) 200 45
D (UI) 20 à 40 25
E (mg) 0,35 0,1
C (mg) 4 10
  
Charge osmotique (mOsm/L) Déchets solubles d’élimination urinaire 90 280
  
Calories 60 – 80 57 – 85
TABLEAU DE COMPOSITION COMPAREE LAIT DE FEMME -LAIT DE VACHE. Composition par décilitre

II. LES PROTEINES

II.1 Les caséines:

On note une faible proportion de caséines dans le lait de femme, en particulier au cours des premiers jours, pour atteindre le rapport classique de 40% dans le lait mature.

La caséine beta est la plus importante; sa dégradation libère des peptides à activité biologique (activité opioïde ou anti-infectieuse). La caséine K, plus récemment décrite, est une glycoprotéine contenant 50% de glucides. La digestion de la caséine pourrait libérer une fraction glycopeptidique stimulant la croissance des bifidobactéries.

Quoique moins riches en phosphore que dans le lait de vache, ces phosphoprotéines (complexe de caséinate de calcium et de phosphate de calcium) permettent d’apporter à l’enfant calcium et phosphore dans un rapport optimal facilitant leur absorption.

La précipitation intra gastrique des protéines du lait de femme entraîne une coagulation fine permettant une vidange gastrique de 60 à 90 minutes. À l’inverse, la précipitation du lait de vache du fait de sa richesse en caséines aboutit à une coagulation en gros blocs avec une vidange gastrique de 3 heures.

II.2 Les protéines solubles (du lactosérum):

  • L’alpha lactalbumine, protéine de 14000 daltons, possède une structure en partie analogue au lysozyme mais également à la lactalbumine bovine.
  • La lactotransferrine (25 % des protéines du lactosérum) a la propriété de fixer le fer à l’état trivalent et son avidité pour le fer est trois fois plus importante que celle de la sidérophiline. La glande mammaire a ainsi la capacité de capter le fer sérique et de le transporter jusque dans le duodénum du nouveau-né où il est absorbé et repris par la ferritine. Cette globuline, en s’emparant du fer nécessaire au développement de certaines bactéries, aurait ainsi un effet protecteur anti-infectieux.
  • Le lait maternel contient par ailleurs un taux élevé d’immunoglobulines et de lysozyme.
  • Rappelons qu’il est dépourvu de bêta lactoglobuline.

II.3 L’équilibre en acides aminés (A.A.)

L’Équilibre du lait maternel est mieux adapté : peu de méthionine, plus de cystine. Le lait de femme est riche en taurine (8 mg/100ml) et en cystéine, A.A semi essentiels. Le rapport AA essentiels sur AA non essentiels est de 0,75.

II.4 L’azote non protéique

Il représente 20% de l’azote total du lait humain.

Il s’agit:

  • d’acides aminés libres avec fort taux de taurine et d’acide glutamique.
  • de l’azote contenu dans les oligosaccharides (N-Acetylglucosamine).
  • des nucléotides, molécules composées d’une base purique ou pyrimidique, d’un pentose et d’un (ou plusieurs) groupement phosphate. Précurseurs de la synthèse des acides nucléiques, on conçoit leur rôle biologique fondamental. Ils auraient par ailleurs de multiples autres effets ayant motivé la supplémentation des formules lactées aux U.S.A. et en France.

On leur a attribué:

  • des effets immunologiques: maturation des lymphocytes, production d’interleukine 2, activité NK.
  • une meilleure biodisponibilité du fer.
  • un effet favorable sur la croissance du bacille bifide.
  • un effet stimulant de la croissance et de la maturation du tube digestif. − une augmentation des taux circulants des HDL.

Leurs taux dans le lait maternel sont les suivants:

  • Cytidine MP: 1 à 17 mg/L
  • Uridine MP: 0,1 à 10,5 mg/L
  • Adénosine MP: 0,1 à 5,4 mg/L
  • Guanosine MP: 0,1 à 3 mg/L
  • Inosine MP: 0 à 3 mg/L

III – LES GLUCIDES

Le lait de femme est plus riche en glucides que le lait de vache (6 à 7 g/L contre 4,5 à 5g/L), mais surtout, il s’agit de lactose beta, jouant un rôle important dans l’absorption du calcium et dans la formation des cérébrosides dont on conçoit l’importance au début de la vie quand la croissance du cerveau est particulièrement rapide. Une partie du lactose du lait de femme n’est pas hydrolysée et absorbée, sa transformation en acide lactique dans le colon entraine une baisse du pH, favorise le développement de la flore acidophile riche en bacilles bifides.

Les glucides du lait de femme sont également constitués de 15 à 20% d’oligosaccharides constituant le “ gynolactose ”. Il s’agit de monosaccharides (galactose, glucose, fucose, N-Acetylglucosamine, N-Acetyl-galactosamine, acide neuraminique) incorporés dans des oligosaccharides dont la quantité et la variété sont très spécifiques au lait humain.

IV LES LIPIDES

Si les taux sont proches dans le lait de femme et le lait de vache, la différence tient essentiellement dans l’aspect qualitatif et en particulier la richesse en acides gras polyinsaturés.

IV.1 Quantité globale:

Le taux moyen est de 3,5 g/100ml ; il est surtout très fluctuant au cours même de la tétée, d’une période à l’autre de la journée, en fonction de l’alimentation de la mère et bien sûr d’une femme à une autre.

IV.2 Composition:

Le lait maternel est constitué de triglycérides (à 80%), de diglycérides, d’acides gras (AG) libres, de cholestérol et de phospholipides.

Les triglycérides sont composés d’une molécule de glycérol et de trois AG. La disposition des différents AG sur les trois sites de liaison du glycérol sont variables d’une espèce à une autre. Dans le lait de femme, on note une forte proportion d’acide palmitique (C16:0) et d’acide myristique en position C2, alors que les positions C1 et C 3 sont surtout occupées par les AG insaturés. La disposition différente dans le lait de vache, où l’acide palmitique occupe les positions C1et C2, peut expliquer la moins bonne digestibilité et justifie la supplémentation des aliments lactés en graisses d’origine végétale et TCM.

Le lait maternel est toutefois essentiellement constitué d’AG à longue chaîne: 98% de C12 à C22.

IV.3 AG insaturés:

− Les monoinsaturés:

Acide palmitoléique (C16:1n-9)(0,5%)

Acide oléique (C18:1 n-9)(25 à 30%)

− Les polyinsaturés à longue chaine(AGPLC ou PUFA pour les anglophones):

Ils appartiennent à 2 “ séries ” et sont synthétisés par une suite de réactions enzymatiques d’élongation et de désaturation :

Série n-6

– Acide linoléique (C18:2 n-6)(10-15%)

– Acide di-homo-gamma linolénique (C20:3 n-6)(0,3%)

– Acide arachidonique (C20:4 n-6)(0,4%)

– Acide docosatetraénoique (C22:4 n-6)(0,1%)

Série n-3

– Acide alpha linolénique (C18:3 n-3)(0,5-0,8%)

– Acide éicosapentaénoique (C20:5 n-3)( 0,12% )(EPA)

– Acide docosapentaénoique (C22:5 n-3)(0,5%)

– Acide docosahexaénoique (C22:6 n-3)(0,4%)(DHA)

Les AG polyinsaturés jouent de multiples rôles biologiques: précurseurs d’éîcosanoides (prostaglandines), constituants membranaires (retrouvés à un taux élevé dans le cerveau et la rétine). Si la nature “ essentielle ” de l’acide linoléique est connue de longue date (parfois appelé vitamine F) et a fait l’objet d’une règlementation depuis plus de 20 ans, les connaissances sur les autres AG polyinsaturés à longue chaîne sont plus récentes.

Les étapes de désaturation des AG semblent moins fonctionnelles chez le nouveau-né surtout prématuré, en particulier pour la synthèse de DHA (série n-3) et d’acide arachidonique (série n-6). La présence de ces AGPLC dans le lait maternel revêt une importance toute particulière à l’origine de nombreux travaux et d’essai de supplémentation. Les AG de supplémentation sont cependant pour la plupart issus d’huiles de poisson, riches en EPA dont l’apport en trop forte proportion pourrait freiner la synthèse d’acide arachidonique par blocage de la delta 5 désaturase. Un équilibre très soigneux est indispensable à respecter dans cette supplémentation et doit suivre les apports recommandés: 4 à 10% de l’AET pour l’acide linoléique, un rapport acide linoléique/acide alpha linolénique de 5 à 15, des AGPLC n-3 à 0,5% et n-6 à 1% des AG totaux.

V. LES SELS MINERAUX

Le taux est beaucoup plus faible dans le lait de femme (200 mg/100ml) que dans le lait de vache (700 mg/100ml).

La charge de chlorure de sodium, plus élevée dans le lait de vache (27 mEq/l, contre 9 mEq/l) dépasse les possibilités d’élimination du rein du petit enfant, non encore mature.

Les taux de calcium et de phosphore plus élevés dans le lait de vache sont dus à sa richesse en caséines comportant plus de calcium, de phosphore et de magnésium. Le rapport calcium/phosphore est cependant très différent : 2,2 dans le lait humain contre 1,3 dans le lait de vache. 60 % du calcium du lait maternel est absorbé, contre 20 % seulement du calcium du lait de vache. La meilleure absorption du calcium contenu dans le lait maternel est du à ce rapport optimal, à la richesse en lactose et à la bonne digestibilité des graisses. La malabsorption des graisses favorise la perte fécale de calcium par constitution de savons. La constitution de ses graisses et l’activité lipasique intrinsèque du lait maternel sont donc des éléments importants de l’absorption du calcium. L’enrichissement corporel en calcium au cours des 4 premiers mois est évalué à 25-28 mg/J.

Pour le phosphore, l’absorption est de 90% et la rétention quotidienne de 12-13 mg/J.

VI. LES OLIGO-ELEMENTS

Leur rôle biologique, quoiqu’encore imprécis par beaucoup d’aspects, est essentiel dans la constitution du squelette. Leur concentration est en règle générale plus élevée dans le colostrum que dans le lait mature et leur absorption meilleure que dans le lait de vache.

V.1 Le fer:

30 à 70 ug/100ml. Le fer contenu dans le lait de femme est intimement lié à la lactoferrine à 30 -40%. On note toutefois que la lactoferrine n’est saturée qu’ à 1 à 10% et que son rôle biologique réel reste obscur.

Un tiers du fer est fixé au globules graisseux (xanthine oxydase pouvant fixer 8 atomes de fer); une plus faible proportion est fixée aux caséines et au citrate.

Il existe des variations de la richesse en fer: en fonction du terme, de la nature colostrale ou mature du lait, du moment de la tétée. Par contre il semble que le statut en fer de la mère n’intervienne que peu dans la richesse en fer de son lait.

Quoiqu’il en soit, la biodisponibilité est élevée: 50 à 75 % du fer sont absorbés.

V.2 Le zinc:

50 à 400 ug/100ml. Le zinc est contenu dans le lactosérum (albumine, citrate) (45-58%), les globules graisseux (12-38%), les caséines (phosphosérines)(8-14%). Sa concentration baisse au cours de la lactation mais sa biodisponibilité est élevée, facilitée semble-t-il par la liaison au citrate.

V.3 Le cuivre:

25 à 70 ug/100ml. Le cuivre est lié aux protéines solubles, en particulier l’albumine (45-55%), aux caséines (quelques %) et aux graisses (20%).

V.4 Le manganèse:

0,4 à 5 ug/100ml. Sa plus grande partie est liée à la lactoferrine. Il a un rôle de cofacteur enzymatique (synthèse des polysaccharides).

V.5 Le Molybdène: 0 à 2 ug/100ml

V.6 Le Cobalt: 0,1 à 2,7 ug/100ml

V.7 L’ Iode: 0,7 à 1,2 ug/100ml

V.8 Le Sélénium: 1,5 à 6 ug/100ml

V.9 Le Chrome: 1,4 à 4 ug/100ml

V.10 Le Fluor: 0,1 ug/100ml

Certains éléments, tels le sélénium, le chrome et le fluor peuvent présenter un risque de toxicité en raison d’une trop forte concentration dans l’environnement. D’autres métaux semblent n’avoir aucun rôle biologique et pouvoir comporter un risque toxique en raison de leur présence dans l’environnement et le risque de contamination du lait maternel: le mercure, le plomb (peintures, vernis), le cadmium (fumée de cigarette) et bien sur les éléments radioactifs.

VII. LES VITAMINES :

On constate un taux faible de vitamines B1, B2, B6, B9, B12 , et surtout de vitamine K pouvant ne pas couvrir les besoins du nouveau-né. Ceci justifie la supplémentation systématique en période néonatale (quel que soit le mode d’alimentation) pour couvrir le risque de maladie hémorragique.

De la même façon, le taux de vitamine D est très dépendant du statut vitaminique de la mère et peut justifier une supplémentation de l’enfant au sein (et de sa mère).

VIII – LES HORMONES ET SUBSTANCES APPARENTÉES

Certaines hormones semblent avoir un rôle actif: l’insuline, le facteur de croissance épidermique (EGF), les prostaglandines et les hormones thyroïdiennes (à un taux semble-t-il suffisant pour prévenir les séquelles d’une hypothyroïdie néonatale). Même si leur rôle biologique dans des conditions physiologiques reste obscur, de nombreuses autres substances hormonales sont contenues dans le lait humain: prolactine, stéroïdes ovariens et surrénaliens, calcitonine, érythropoïétine, neurotensine, somatostatine, bombésine.

IX – LES FACTEURS DE DEFENSE CONTRE LES INFECTIONS

L’allaitement maternel peut -et doit- être considéré comme la « norme » physiologique de l’alimentation de l’enfant humain. Il constitue un mode de défense « passive » d’un bénéfice sur le plan immunologique.

VIII .1 Les immunoglobulines

Les IgAs contenus dans le colostrum puis le lait sont les facteurs de défense les mieux connus. Représentant 97% des protéines du colostrum initial, leur concentration peut être initialement de 5 à 15 g/L pour diminuer ensuite rapidement à 0,5 à 1 g/L, mais la quantité de lait ingérée augmentant rapidement, l’apport quotidien reste élevé, de l’ordre de 1g/J d’IgAs. Les IgAs ont une spécificité contre des agents infectieux bactériens ou viraux (Escherichia coli, Salmonella, Shigella, virus de la poliomyélite, etc..) ou des protéines alimentaires présentes dans l’alimentation de la mère (Protéines du lait de vache, de soja).

Le lait humain contient également à une concentration sans commune mesure des IgG et IgM.

VIII .2 Les cellules du lait.

Le colostrum contient des leucocytes (3.10 ⁶/ml), dont 90% de macrophages et, 10% de lymphocytes. Leur nombre diminue ensuite et leur réel rôle biologique dans le tube digestif du nouveau-né est mal connu.

VIII .3 Les moyens de défense non spécifiques

− La lactoferrine capte le fer nécessaire à la croissance bactérienne (Gram – ). Elle aurait ainsi un rôle bactériostatique voire, quoique non démontré, bactéricide .

− Les ligands de l’acide folique et de la vitamine B12 ont un rôle équivalent par le même mécanisme de compétition avec la croissance bactérienne.

− Le lysozyme pourrait attaquer les membranes bactériennes.

− Le facteur de croissance du Bacillus bifidus contribue à l’installation d’une flore colique acidophile.

− On citera enfin de multiples facteurs de défense dont le rôle exact reste obscur: Interféron, Complément, Facteurs antibactériens, viraux ou parasitaires, Agents à rôle « anti-inflammatoire » pouvant notamment bloquer la libération de cytokines protégeant ainsi contre l’entérocolite ulcéro-nécrosante.

X – CONDUITE ET HYGIENE DE L’ALLAITEMENT

1. Il est nécessaire de faire une préparation psychologique pendant la grossesse plutôt que d’aborder le problème de l’allaitement « au dernier moment ».

2. Il faut souligner sa valeur nutritionnelle mais également psycho-affective.

3. La tétée est soumise à quelques règles simples :

  • nettoyage du mamelon à l’eau bouillie sans antiseptique, ni alcool avant la tétée.
  • tétée courte (moins de 15 minutes),
  • début de la tétée par un sein différent,
  • faciliter les premières succions par quelques pressions de l’aréole,
  • donner si possible les deux seins à chaque tétée sans s’inquiéter si l’enfant ne prend pas bien le second,
  • après chaque tétée, nettoyage des mamelons et aréoles à l’eau pour éviter la macération de lait dans les plis à l’origine des crevasses.
  • protéger les mamelons entre les tétées par une gaze stérile.

4. Au cours de l’allaitement, il faut exclure tabac et alcool,

5. Augmenter les ingestas caloriques de la mère. Pour faire 850 ml de lait (soit 570 Cal – besoins d’un enfant de 3 mois), il faut 700 Cal environ, d’origine alimentaire et de réserve.

6. Ne pas augmenter la consommation lactée de la mère mais augmenter son apport hydrique.

7. Le problème des médicaments passant dans le lait maternel. Si la mère doit poursuivre cette thérapeutique avec des médicaments potentiellement toxiques, il vaut mieux contre-indiquer l’allaitement.

A titre d’indication, on peut donner la liste suivante des médicaments formellement contre-indiqués : Acide nalidixique, Anticancéreux, Anticoagulants oraux (sauf warfarine), Antithyroïdiens de synthèse, Atropine, Chloramphénicol, Dérivés de l’ergot de seigle (sauf Methergin), Iodures, Laxatifs (sauf mécaniques), Lithium, Métronidazole, Morphiniques, Éléments radioactifs, Sulfamides, Tétracyclines, Tolbutamide.

EN PRATIQUE

– Il est recommandé de pratiquer l’allaitement à la demande.

– Au départ 6 à 8 tétées espacées de 2h30 à 4 heures.

– La variabilité des horaires et du nombre de tétées dépend de la rapidité d’installation du rythme mycthéméral et du sommeil nocturne prolongé.

– A l’âge de 4 à 8 semaines, l’enfant a en règle 5 à 6 tétées assez régulières et a une durée e de sommeil nocturne de 8 heures continues.

– Il ne faut pas abusivement considérer que chaque pleurs de l’enfant signifient qu’il a faim et le mettre au sein toutes les 1/2 heures.

– Il est inutile de peser l’enfant avant et après chaque tétée pour juger de la quantité bue, il suffit de s’assurer d’une prise de poids normale.