Grande variété des tumeurs pédiatriques associées à des anomalies du développement

Les cancers pédiatriques sont rares mais revêtent une grande diversité. Certains débutent dès la période embryonnaire ; l’apparition précoce est un argument contre le rôle de facteurs environnementaux et suggère une prédisposition génétique. Une grande série rétrospective a révélé que 8 % à 12 % des cancers pédiatriques pourraient être associés à des mutations germinales.

Certains syndromes comportent une prédisposition aux tumeurs associée à des malformations. Parmi ceux-ci, le syndrome de Denys-Drash (glomérulopathie, anomalies génitales), les RASopathies (atteinte des voies de signalisation cellulaires), les phacomatoses en sont des exemples. De surcroît, l’association entre cancers et anomalies congénitales variées sans syndrome connu est documentée. Les arguments diagnostiques sont la récurrence familiale et l’apparition multiple de tumeurs multifocales.

Une étude multicentrique française (Tumeur et Développement) rapporte les résultats prospectifs et rétrospectifs des associations de tumeurs et de malformations sur une base nationale. Les anomalies congénitales pouvaient 1) être connues avant le cancer ; 2) découvertes lors du bilan 3) révélées lors du conseil génétique. Les lignées germinales et les échantillons de la tumeur ont été conservés pour analyse ultérieure.

Les anomalies congénitales ont été classées en 2 groupes : syndromes génétiques connus y compris les anomalies chromosomiques, les syndromes comportant des anomalies multiples et/ou ceux bien définis comme les phacomatoses. Le 2ème groupe réunissait les patients avec des anomalies congénitales n’entrant pas dans le 1er groupe, divisées en 13 catégories en fonction de la localisation ou du type des symptômes. Les cancers et maladies hématologiques malignes ont été classés en 12 catégories. Un compte-rendu histologique était disponible pour chaque tumeur.

Mutations germinales, anomalies post-zygotiques et…coïncidences 

De 2013 à 2019, 679 associations ont été enregistrées. Le sexe ratio garçons/filles était de 1,18 ; l’âge médian au diagnostic de la tumeur de 4,2 ans (-0,1-17,9). Le taux de consanguinité connu pour 485 patients (71,4 %) était de 3,1 % (n = 20) en comparaison de 0,15 % dans la population générale. Une conception médicalement assistée était notée pour 12 patients (3,8 %) : hémopathies après stimulation de l’ovulation, tumeurs embryonnaires après FIV. En tout, les tumeurs du système nerveux central étaient les plus représentées (n = 139 ; 20 %), puis les leucémies et syndromes myélodysplasiques (n = 123 ; 18,1 %) et les tumeurs rénales (n = 101 ; 15 %).

Les anomalies congénitales étaient sans relation avec un syndrome génétique connu dans 66,5 % des cas. Dans ce groupe, les anomalies les plus communes étaient le retard intellectuel (22,3 %) puis les atteintes musculo-squelettiques (14,2 %) et génito-urinaires (12,4%). Les retards intellectuels étaient principalement associés aux maladies malignes hématologiques et aux tumeurs neurologiques, les anomalies uro-génitales aux tumeurs rénales, les malformations musculo-squelettiques aux rhabdomyosarcomes, les troubles de croissance staturale aux tumeurs rénales. Les tumeurs embryonnaires (neuroblastomes, néphroblastomes, rhabdomyosarcomes) étaient parfois en proche proximité d’une malformation.

En conclusion, trois « tendances » majeures ont été identifiées, les mutations de la lignée germinale, les anomalies post-zygotiques responsables de mosaïsme, des coïncidences.

Pr Jean-Jacques Baudon

RÉFÉRENCE

Semeraro M et al. : Pediatric tumors and developmental anomalies: a French nationwide cohort study. J Pediatr 2023;259:113451. doi: 10.1016/j.jpeds.2023.113451.

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